A la recherche de la chaussure en poésie [ Anthologie subjective

DANS LE GRAND XX° | Léon-Paul FARGUE 1876-1947 | Sous la lampe| Extrait

  Dessin aquarelle janvier 2015

Tanguy DOHOLLAU (c)

 

 

 

            NOCTURNE

            [...]

Un long bras timbré d'or glisse du haut des arbres

Et commence à descendre et tinte dans les branches.

Les fleurs et les feuilles se pressent et s'entendent.

J'ai vu l'orvet glisser dans la douceur du soir.

Diane sur l'étang se penche et met son masque.

Un soulier de satin court dans la clairère

Comme un rappel du ciel qui rejoint l'horizon.

Les barques de la nuit sont prêtes à partir.

D'autres viendront s'asseoir sur la chaise de fer.

D'autres verront cela quand je ne serai plus.

[...]

 

Léon-Paul Fargue, Sous la lampe


Fabrice FARRE | Le chasseur immobile | Editions Le Citron Gare

 

 

LE CHASSEUR IMMOBILE Fabrice FARRE

 

                    HISTOIRE

 

                    Je n'aurai jamais assez de mes chaussures

 

Je m'en remets aux

blessures de mes chaussures

Avoir tant marché et n'avoir

jamais quitté les rues. Avoir été

sans possession ni devenir

d'un ADN propice à l'usure

tout comme mes lacets.

Je suis d'un cuir dur, cependant, jamais

de ce similé plissé qui

exprime à lui seul la difficulté

d'être à plat, la facilité de me taire.

 

 

Fabrice FARRE | Le chasseur immobile |

Editions Le Citron Gare,2014.

Images de Sophie BESSART.

 


Les chaussures dans les Haïkus | Damien GABRIELS | Revue GONG de l'Association Francophone de Haïku N° 48

 

Revue GONG de l'AFH (Association Francophone de Haïku)

 

REVUE HAÏKU  GONG N°48

 

                    rien d'autre aujourd'hui

                    que d'espérer les mésanges

                    dans le lilas mauve

 

 

                    dernier jour d'été -

                    quelques pas en équilibre

                    au bord du trottoir

 

                    heure d'été -

                    je troque mes charentaises

                    contre des espadrilles

 

                   Damien GABRIELS | GONG N° 48  Juillet-Septembre 2015 | p.55


En Poémie Amie 2015 | Alain WEXLER | La chaussure

RHINOCEROS

 

LA CHAUSSURE

 

    Quand une chaussure se délasse devant

une assiette elle tire la langue jusque dans

le cou bien que les soucis plissent un front

qu'elle porte trop bas, celui d'un animal qui

crie les premiers soirs, qui écrase tout sur

son passage, qui sue par toutes les coutu-

res sa peur de l'eau et du froid.

 

    Je le brise, je le dépèce et j'attelle un rhi-

nocéros dont le masque sans regard fouille

le noir, dont j'ignore s'il tâtonne de l'orteil

ou de l'oreille.

 

    Son cou se serra d'épouvante lorsqu'il se

vit dans l'arène, les grappes de la foule prê-

te à l'écraser. Prudemment il tenta une sor-

tie risquant hors du pressoir une oreille puis

un orteil.

 

    La démarche était hésitante, entre deux

vins, ou les yeux bandés.

Il regrettait surtout cette ceinture sur

l'estomac à la fois près du cou et des

talons, même si après la course tous ses

boeufs étaient comblés.

 

    Il rentrait dans la maison d'un pendu.

L'idée d'un tel dénouement ne le fit pas

reculer, il essaya toutes les chaussures, com-

para la hauteur du front et la profondeur

du nez, vérifia la justesse des oreilles et la

longueur de la langue. Ces qui n'empêcha

pas les oreilles de frotter contre les trom-

pettes ou les doigts sur les serrures. Qui ren-

trait là se contenter d'occuper les lieux,

étant persuadé d'y être arrivé le premier.

 

 

    Tirer la langue la lie à l'hôte qui

la comble. Celui-ci tolère qu'elle sorte l'oreille

de temps en temps. Bonne précaution lors-

qu'on saute du lit, le dormeur l'écrase,

tâtonne de l'orteil puis, pour se donner

contenance, marche à grands pas dans la

rue.

    Rien ne l'arrête, autant parler de dénoue-

ment à un pendu.

 

 

Alain WEXLER | Tables| Le dé bleu |1992 | p.32-33.


DANS LE GRAND XX°| Paul CLAUDEL 1868-1955| La muse qui est la grâce | Argument

 

Winfried VEIT Des stèles aux étoiles

                                                                                                                    Winfried VEIT | De la stèle aux étoiles

 

[...]

Voici  le dépliement de la grande Aile poétique !

Que me parlez-vous de la musique ? laissez-moi seulement mettre mes sandales d'or. 

[...]

    

 

 

[...]

Comme de haut on a plaisir à reconnaître sa maison, et la gare, et la mairie et ce bonhomme avec ce chapeau de paille, mais l'espace autour de soi est immense !

Car à quoi sert l'écrivain, si ce n'est à tenir des comptes ?

Que ce soit les siens ou d'un magasin de chaussures, ou de l'humanité tout entière.